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The Pamphlet Collection of Sir Robert Stout: Volume 28

III

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Je reviens à l'épargné que l'on pratique dans les écoles de Gand dès la plus tendre enfance; nous avons des livrets dans nos écoles gardiennes. Au Ier juillet 1871, il y avait dans ces écoles 2,659 enfants et 980 livrets; pendant le premier semestre de l'année, on a pris 401 livrets nouveaux. On nous fait un crime de ce que nous considérons comme un page 10 progrès. Priver des enfants de trois à six ans du plaisir de manger quelques friandises, c'est de l'inhumanité, dit-on, et cette cruauté est parfaitement inutile. Est-ce que l'on peut faire comprendre à des enfants de cet âge ce que c'est que la vertu de l'économie? A quoi peut servir l'épargne quand les enfants ne savent pas ce qu'ils font?

Je vais répondre à cette nouvelle accusation, mes amis; elle me fournira l'occasion de vous donner des conseils que vous serez bientÔt dans le cas de pratiquer. Pourquoi y a-t-il des écoles gardiennes? Elles ne servent pas uniquement à garder les enfants; ce sont des écoles, donc des établissements d'instruction et d'éducation. Y aurait-il par hasard un âge fixe auquel on commence à élever les enfants? L'éducation commence avec la vie et ne finit qu'avec elle. Sans doute elle se proportionne et elle varie avec les forces de l'intelligence. Dans le bas âge, c'est une discipline; on inculque les vertus par l'habitude. Pourquoi n'habituerait-on pas les enfants à l'économie, comme on les habitue à l'obéissance? Faut-il attendre que la raison de l'enfant soit développée pour pour procéder à son éducation? La question implique une absurdité : ce serait attendre pour développer les facultés de l'enfant que ces facultés soient développées! L'éducation est une Œuvre progressive : à chaque âge on dit et on apprend à l'enfant ce qu'il est en état de comprendre et de faire.

Comment enseignons-nous l'épargne dans nos écoles gardiennes et dans les classes inférieures de nos écoles communales? Nous disons aux enfants que c'est mal faire de dépenser son argent à acheter des friandises, qui sont le plus souvent mauvaises et qui par conséquent les rendent malades. Est-ce à dire que nous voulions priver les pauvres petits du plaisir de manger de bons fruits? Dieu nous en garde! Nous conseillons aux mères d'acheter elles-m≖mes des fruits, ou les friandises que leur fortune page 11 leur permet de donner aux enfants, et de les manger à table, en famille. De cette manière, la dépense, au lieu d'≖tre nuisible, deviendra profitable, et on développera en m≖me temps l'esprit de famille au lieu de nourrir l'égoïsme.

A mesure que l'intelligence de l'enfant se développe, on lui explique les avantages de l'économie. Il comprendra bien vite les bienfaits économiques de l'épargne. Chaque remboursement demandé à l'école sera l'occasion d'une leçon pratique. Pendant le premier semestre de 1871, une somme de près de vingt-sept mille francs 1 a été remboursée dans toutes les écoles de Gand, y compris les écoles payantes et les écoles d'adultes. Ces remboursements sont tous une application du dicton populaire : une pomme pour la soif. D'ordinaire ils servent à acheter des habillements aux enfants m≖mes qui épargnent ou à leurs frères et sŒurs : ne vaut-il pas mieux ≖tre bien v≖tu que de manger de mauvaises friandises le dimanche? Voilà une leçon à la portée de tout enfant. La leçon prend souvent un caractère plus moral. Une maladie emp≖che le père de travailler; la famille manquerait de pain, sans les livrets des enfants. Les parents sont heureux de trouver cette pomme pour la soif. Voici un des mille faits qui se passent tous les jours dans nos écoles. Il y a encore des parents qui, dans leur aveugle ignorance, s'opposent à l'épargne. Une jeune ouvrière économisa à l'insu de sa mère ce que celle-ci lui donnait le dimanche sur son salaire. L'ouvrage vint à manquer, comme cela arrive si souvent dans nos villes manufacturières. La mère se lamente et dit qu'il faudra aller mendier. Non, dit la fille; j'ai cinquante francs à la Caisse d'épargne. Cela nous suffira pour vivre plusieurs semaines, en réduisant la dépense au strict nécessaire; d'ici page 12 là nous trouverons du travail. La mère pleura de joie en venant toucher ce trésor, et elle bénit ceux qui avaient introduit l'épargne à l'école.

1 Francs 26,936-12.