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The Pamphlet Collection of Sir Robert Stout: Volume 34

'Times,' December 14th, 1874. — Ultramontanism in Belgium

page 65

'Times,' December 14th, 1874.

Ultramontanism in Belgium.

Monsieur.

Lord Arundell de Wardour dit "that during the last two centuries no Pope has trenched upon the political ground;" et Lord Acton, tout en prouvant jusqu'à quels excès ont été portées les doctrines Ultramontaines, croit néanmoins qu'il n'en peut résulter actuellement aucun danger.

Permettezmoi de montrer combien le danger est réel et grand, en rappelant certains faits empruntés a, l'histoire de mon pays, la Belgique.

En 1815, le Roi Guillaume du Pays-Bas voulut donner a son rovaume une Constitution qui consacrait toutes les libertés modernes. L'Épiscopat Beige condamna cette Constitution dans un jugement doctrinal, au nom de l'Église, et la fit rejeter dans l'Assemblée des Notables par 798 voix contre 527. Il est utile de reproduire les termes de ce jugement doctrinal, parce qu'ils montrent clairement que les vrais Catholiques ne doivent pas maintenir les libertés modernes quand ils peuvent les supprimer:—

"C'est done pour remplir un des devoirs les plus essentiels de l'Épiscopat, pour nous acquitter envers les peuples, sur page 66 lesquels le Saint-Esprit nous a etablis évêques pour gouvemer l'Eglise de Dieu (Act. 20, v. 28), de l'obligation qui nous a été strictement imposée par l'Église, que nous avons jugé nécessaire de déclarer qu'aucun de nos diocésains respectifs ne peut, sans trahir les plus chers intérêts de sa religion, sans se rendre coupable d'un grand crime, prêter les différents serments presents par la Constitution, par lesquels on s'engage à maintenir la nouvelle loi fondamentale, ou a concourir au maintien et à l'observation de la dite loi.

"En effet, ou s'oblige par les dits serments à observer et à maintenir tous les articles de la nouvelle Constitution et, par consequent, ceux qui sont opposés à l'esprit et aux maximes de la religion Catholique, ou qui tendent évidemment à opprimer et à asservir l'Église de Jésus Christ.

"Or, tels sont les articles suivants:

"'Art. 190. La liberté des opinions religieuses est garantie à tous.

"'Art. 191. Protection égale est accordée à toutes les communions religieuses qui existent dans le royaume.

'"Art. 192. Tous les sujets du Roi, sans distinction de croyauce religieuse, jouissent des mêmes droits civils et politiques, et sont habiles à toutes dignités et emplois quelconques.

"'Art. 193. L'exercice public d'aucun culte ne peut être empêché, si ce n'est dans le cas où il pourrait troubler l'ordre et la tranquillité publique.

"'Art. 196. Le Roi veille à ce que tous les cultes se contiennent dans l'obéissance qn'ils doivent aux lois de l'État.

'"Ait. 226. L'instruction publique est un objet constant des soins du Gouvernement. Le Roi fait rendre compte tous les ans aux États-Généraux de l'état des écoles supérieures, moyennes et inférieures.

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"'Art. 145. Les États (provinciaux) sont chargés de l'exécution des lois relatives à la protection des différents cultes et à leur exercice extérieur, à l'instruction publique, &c.

"'Art. 2.—Additionel.—Toutes les lois demeurent obligatoires jusqu' à ce qu'il y soit autrement pourvu.'

"Nous nous bornerons à faire sur chacun de ces articles quelques courtes observations.

"Art. 190 et 191.—1. Jurer de maintenir la liberié des opinions religieuses et la protection égale accordée à tons les cultes, qu'estce autre chose que de jurer de maintenir, de protéger l'erreur comme la verité; de favoriser le progrès des doctrines anti-Catholiques; de semer, autant qu'il est en son pouvoir dans le champ du père de famille, l'ivraie et le poison qui doivent infecter la génération présente et les générations futures; de contribuer ainsi, on ne peut plus efficacement, à éteindre peu à peu dans ces belles contrées le flambeau de la vraie foi? L'Église Catholique, qui a toujours repoussé de son sein l'erreur et l'hérésie, ne pourrait regarder comme ses vrais enfants ceux qui oseraient jurer de maintenir ce qu'elle n'a jamais cessé de condainner. Il est notoire que cette dangereuse nouveauté n'a été introduite, pour la première fois, dans un pays Catholique, que par les révolutionnaires de France, il y a environ vingtcinq ans, et qu'à cette époque le chef de l'Église la condamna hautement.

"'La religion,' ditil, 'a déjà été fortement attaquée par les décrets qui sont émanées de cette Assemblée Nationale. Des maux que nous déplorons ont été occasionnés par les fausses doctrines qu'on a répandues depuis longtemps dans une multitude d'écrits empoisonnés qui se trouvent dans les mains de tout le monde; et c'est afin que cette funeste contagion se propageât avec plus de hardiesse et de rapidité par les moyens de la presse, qu'une des premières opérations de l'Assemblée Nationale a été de décréter la liberié de page 68 penser ce qu'on voudrait en matière de religion, d'exprimer librement et impunément ses opinions à cet égard, de ne suivre, en un mot, d'antres règies et d'autres lois en cette matière que celles qu'on voudrait se prescrire.

"'Informés de ces événements, pouvonsnous garder le silence sur tant de maux, et ne pas élever notre voix Apostolique contre ces funestes décrets qui ont pour objet d'anéantir la religion?' (Allocution du 29 Mars 1790.)

"Art. 192.—2. Jurer de maintenir l'observation d'une loi qui rend tous les sujets du Roi, de quelque croyance religieuse qu'ils soient, babiles à posséder toutes les dignités et emplois quelconques, ce serait justifier d'avance et sanctionner les mesures qui pourront être prises pour confier les intérêts de notre sainte religion dans les provinces, si éminément Catholiques, à des l'onctionnaires Protestants.

"Art. 196.—4. Jurer d'observer et de maintenir une loi, qui suppose que l'Église Catholique est soumise aux lois de l'État et qui donne au souverain le droit d'obliger le ciergé et les fidèles à obéir à toutes les lois de l'État, de quelque nature qu'elles soient, c'est s'exposer munifestement à coopérer à l'asservissement de l'Église Catholique. C'est au fond soumettre, suivant l'expression de notre Saint Père le Pape, la puissance spirituelle aux caprices de la puissance séculière. (Bulle du 28 Juin 1809.)

"Art. 226.—5. Jurer d'observer et de maintenir une loi qui attribue au souverain, et à un souverain qui ne professe pas notre sainte religion, le droit de régler l'iustruction publique, les écoles supérieures, moyennes et inférieures, c'est lui livrer à discrétion l'enseignement public dans toutes ses branches, c'est trahir honteusement les plus chers intérêts de l'Église Catholique. Le pouvoir qu'ont les évêques de surveiller l'enseignement de la foi et de la morale Chrétienne dans toute l'étendue de leurs diocèses, comme celui de remplir toutes les antes fonctions do leur ministere, émane de la volonté et de l'autorité de Jésus-Christ lui-même. On page 69 ne peut le leur ôter ni le diminuer sans soumettre la doctrine de la foi et toute la discipline ecclésiastique à la puissance séculière, sans renverser, par conséquent, tout l'édifice de la religion Catholique.

'Art. 145.—6. Jurer d'observer et de maintenir une loi qui autorise les États provinciaux à exécuter les lois relatives à la protection des différents cultes, à leur exercice extérieur, à l'instruction publique, n'estce pas confier les plus grands intérêts de la religion à des laïcs qui n'ont et ne peuvent avoir aux yeux de l'Église Catholique aucune qualité, soit pour reconnaître la justice ou l'injustice des lois de ce genre qui leur seront envoyées, soit pour eu diriger l'application, soit pour en ordonner l'exécution dans les diocèses respectifs?

"Art. 2 addit.—7. Jurer de regarder comme obligatoires jusqu'à ce qu'il y soit autrement pourvu, et de maintenir toutes les lois qui sont maintenant en vigueur, ce serait co- opérer évidemment à l'exécution éventuelle de plusieurs lois anti-Catholiques et mauifestement injustes, que renferment les Codes Civil et Pénal de l'ancien Gouvernement Francais, et notamment de celles qui permettent le divorce, qui autorisent légalement des unions incestueuses condamnées par l'Église, qui décernent contre les ministres de l'Évangile, fidèles à leurs devoirs, les peines les plus sévères, &c.—toutes lois qu'un vrai Catholique doit avoir en horreur.

"Il est encore d'autres articles qu'un véritable enfant de l'Église ne peut s'engager par serment à observer et à maintenir, et dont l'urgence des circonstances ne nous permet pas de nous occuper en ce moment; tel est, en particulier, le 227 me, qui autorise la liberté de la presse, et ouvre la porte a une infinité de désordres, à un déluge d'écrits anti-Chrétiens et anti-Catholiques. Il nous suffit d'avoir prouvé que la nouvelie loi fondamentale contient plusieurs articles opposés à l'esprit et aux maximes de notre sainte religion, et qui tendent évidemment à opprimer et à asservir l'Église de Jésus-Christ; que, par conséquent, il ne peut être permis aux page 70 fidèles Catholiques de s'engager par serment à les observer et à les maintenir.

"Le Prince† Maurice de Broglie, Évêque de Gand.

"†Charles Francois Joseph Pisani de la Gaude, Evêque de Namur.

"†Francots Joseph, Évêque de Tournay.

"J'adhère au jugement doctrinal cidessus porté par Messeigneurs les Évêques du Royaume de Pays-Bas.

"J. Forgeur, Vicaire-Général de l'Archêvché de Malines.

"J'y adhère égaleraent.

"J. A. Barrett, Vicaire-Général, cap. de Liége."

Voici donc un fait qui prouve que, de nos jours encore, l'Église peut faire refuser à un peuple les libertés les plus nécessaires.

A peine la Constitution de 1830 eutelle consacré en Belgique, avec le concours des Catholiques libéraux, les principes condamnés en 1815 par l'Épiscopat, que le Pape les foudroya dans sa fameuse Encyclique de 1832.

On ne peut nier que l'Église condamne, par exemple, la liberté de conscience. Écoutons sur ce point Bossuet, dont l'autorité ne sera pas suspecte, car dans l'écrit dont je vais citer un passage il réclamait une certaine tolérance pour les Protestants:—

"Je déclare (dit-il) que je suis et que j'ai toujours été du sentiment, premièrement, que les princes peuvent contraindre par des lois pénales tous les hérétiques à se conformer à la profession et aux pratiques de l'Église Catholique. Deuxièmement, que cette doctrine doit passer pour constante dans l'Église, qui non-seulement a suivi, mais encore demandé de semblables ordonnances des princes. En établissant ces maximes comme constantes et incontestables parrni les Catlioliques," etc.

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Si donc les Catholiqués disposés à obéir aux décisions du Pape deviennent un jour les maîtres en Belgique, ils supprimeront la liberté. Les journaux des Évêques ne le nient plus depuis qu'ils espèrent voir leur parti rester au pouvoir.

Chaque fois que le Pape actuel a conelu un Concordat avec un gouvernement prêt à lui obéir, il a stipulé Intolérance absolue à l'égard des dissidents. Comme type de ces Concordats je citerai celui conclu le 22 Avril 1863, avec la République de l'Équateur, dont l'Article I. porte:—

"La religion Catholique, Apostolique et Romaine continue d'être la religion de la République de l'Équateur. En conséquence, on ne pourra jamais permettre dans la République l'exercice d'aucun culte ni l'existence d'aucune scciété qui auraient été condamnés Par l'Église."

Quand le Pape actuel stipule que tout Protestant, tout franc-macon sera inexorablement proscrit d'un État, Lord A rundell peutil dire que "no Pope has trenched upon the political ground?"

Supposez rirlande séparée de l'Angleterre et gouvernée par des vrais Ultramontains, ceuxci seraient tenus de faire un Concordat semblable à celui de l'Équateur. N'estce pas ainsi que les derniers Protestants ont été expulsés du Tyrol?

Recevez, Monsieur, &c.,

Émile de Laveleye.

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